Spécialité de l'article : Rhumatologie
Parution du 01/02/2003 pour la lettre n° 32
L’arthrose est une affection dégénérative des articulations, dont le vieillissement consti-tue la principale cause. Nous n’en souffrons pas tous mais, à partir d’un certain âge, nous en sommes tous atteints. La définition de l’arthrose est d’abord radiologique, avec la mise en évidence de quelques modifications essentielles, par rapport à une articula-tion “normale”, non atteinte par le processus arthrosique : un pincement de l’espace arti-culaire, un remaniement de la structure des cartilages et des os, une prolifération os-seuse réalisant des “ ostéophytes ” ou becs de perroquet. L’arthrose peut concerner toutes les articulations, mais elle prédomine en certaines ré-gions du corps : - la colonne vertébrale, en particulier les régions cervicale et lombaire, - les genoux, - les petites articulations des mains et des pieds. L’arthrose des hanches, ou “ coxarthrose ”, est d’une autre nature. Elle se développe presque exclusivement chez les patients atteints d’une “ dysplasie ”, c’est-à-dire d’une légère malformation de l'articulation, que l'on constate dès la naissance.
C’est pourquoi les médecins se montrent très attentifs à l’état des hanches au tout début de la vie afin de corriger d’emblée les anomalies qu'ils constatent. La symptomatologie rapportée à l’arthrose ne s’explique pas uniquement par les seules modifications anatomiques décrites par le radiologue. L’articulation se trouve, en effet, incluse dans un ensemble complexe d’enveloppes, de liquides de lubrification, de liga-ments, de tendons. Ces différents éléments participent au processus de souffrance et ont leur part de responsabilité dans la survenue des troubles pathologiques, essen-tiellement, la douleur, la déformation, l’augmentation de volume passagère ou durable, la diminution de la mobilité. Plusieurs facteurs peuvent déclencher ou aggraver l'arthrose, et les rhumatisants con-naissent bien l'impact de l'environnement, en particulier les conditions météorologi-ques, ainsi que l'importance des lieux de vie. On sait également que l’arthrose se développe avec prédilection sur des articulations autrefois lésées par des traumatismes, et chez des personnes exerçant des professions qui imposent des attitudes maintenues trop longtemps. Les facteurs psychiques interviennent à l’évidence, et il n’est pas rare de constater une poussée douloureuse arthrosique à la suite d’un choc émotionnel ou af-fectif. Il semble exister une corrélation entre les troubles biologiques dus à une alimenta-tion de surcharge (taux de cholestérol, de sucre, d’acide urique trop élevés dans le sang) et des manifestations arthrosiques. Le rôle du surpoids sur l’aggravation des troubles dans certaines localisations de l’arthrose, comme les hanches, et les genoux, est incontestable.
Par ailleurs, il n’est pas impossible qu’une alimentation très riche en calcium ac-célère la production du tissu osseux. Il ne faut pas oublier le facteur héréditaire, et si, en l’état actuel des connaissances, il n’existe aucun moyen thérapeutique médicamenteux directement capable d’empêcher le processus arthrosique, on peut parfaitement en re-tarder l’apparition, par une bonne hygiène de vie, dont les deux principaux éléments sont la pratique d’une activité physique régulière et la lutte contre les désordres alimentaires déjà évoqués.
L’homéopathie ne guérit pas l’arthrose, mais elle en minore les effets (atténuation de la douleur, diminution de la fréquence et de la durée des crises). Le traitement est sélectionné en fonction des diverses manifestations douloureuses décrites par le patient et des circonstances d’amélioration ou d’aggravation des troubles ressentis. Ainsi choisit-on les médicaments en tenant compte de: - l’aggravation par le repos, et par conséquent l’amélioration par le mouve-ment, par exemple Rhus toxicodendron, Natrum sulfuricum, Aranea diadema, Calcarea fluorica, Kalium carbonicum, Ruta graveolens; - l’amélioration par le repos, comme Bryonia, Nux vomica, Colocynthis; - l’aggravation par l’humidité, l’amélioration par la chaleur, etc. Dans la réalité quotidienne, de nombreux rhumatisants souffrent en fin de nuit, voient leur état s’améliorer après un dérouillage matinal, mais retrouvent leurs douleurs dans la journée lors d’activités prolongées ; seul le repos complet entraîne alors un soulagement notable. La prise de Bryonia 9 ou 15 CH, 3 granules au réveil, et de Rhus toxicodendron 9 ou 15 CH, 3 granules au coucher, apporte une sédation satisfaisante en procurant un bon confort de vie. Certains médicaments sont choisis également en fonction de la localisation des mani-festations arthrosiques. On peut citer, par exemple, Lachnantes pour le cou; Actea ra-cemosa pour le dos; Ammonium muriaticum, Calcarea phosphorica, Calcarea fluorica dans les localisations lombaires; Radium bromatum, Kalium iodatum, Bryonia pour les genoux; Caulophyllum, Ledum palustre, lorsque les rhumatismes siègent au niveau des petites articulations des mains et des pieds. Les lésions arthrosiques peuvent être le siège, dans des circonstances mal définies, de poussées inflammatoires qui se manifestent par un gonflement articulaire, une sensation de chaleur, parfois bien objective, des douleurs différentes, plus aiguës, qu’en temps normal. Des médicaments apportent un soulagement rapide, tels qu' Apis mellifica et Bryonia, qui sont prescrits en fonction de la symptomatologie présentée par le patient.
Deux cas cliniques:
1- Madame Charlotte C., 82 ans, mère de 3 enfants, souffre beaucoup de son genou droit depuis quelques jours. Les douleurs sont semblables à des coups d’aiguilles, et sont très aggravées au moindre mouvement. Seule la position couchée, le membre légèrement replié, la soulage. La chaleur induite par une couverture de laine lui fait beaucoup de bien. L’examen montre un genou augmenté de volume, légèrement rosé. La mobilisation est très douloureuse. Le diagnostic ne fait pas de doute: Madame C. présente une nouvelle poussée inflammatoire sur une arthrose connue de ce genou (ou “ gonarthrose ”), qui évolue depuis une vingtaine d’années. Il ne semble pas que les importants troubles circulatoires veineux (varices tortueuses, gonflement des che-villes) qui existent au niveau de ses deux jambes soient directement impliqués dans cet épisode. Madame Charlotte C. est coutumière de ces crises douloureuses provoquées généralement par des périodes de station debout trop prolongée, conséquence de son hyperactivité naturelle. Je conseille, ou plutôt, je confirme, parce qu’elle a déjà commencé le traitement, la prise de 3 gra-nules de Bryonia 9 CH toutes les heures au début, puis toutes les 2 heures dès que les douleurs diminuent d’intensité; enfin 3 fois par jour, lorsqu’elles deviennent tout à fait supportables, jus-qu’à leur disparition. Elle poursuivra ensuite Bryonia 15 CH, 3 granules tous les matins pendant un mois.
2 - Madame Marie-Jeanne B., 42 ans, souffre depuis dix jours d’un torticolis apparu brutalement au réveil, en même temps qu’un mal de gorge, sans fièvre. La nuque est très douloureuse au mouvement, empêchant de tourner la tête, à droite comme à gauche. Elle peut seulement la baisser de manière incomplète. Elle est réveillée la nuit en se retournant sur l’oreiller. Elle n’est soulagée que la tête maintenue droite et strictement immobile, et par la chaleur (douche très chaude, foulard de laine autour du cou). L’examen montre une contracture des muscles du cou. La gorge est normale. Les radiographies de Madame B. montrent des signes d’arthrose cervi-cale. Je prescris 3 granules de Bryonia 9 CH et de Lachnantes 7 CH, toutes les 2 heures en al-ternance, une fois l’un, une fois l’autre, jusqu’à disparition de la douleur. La mobilité est redeve-nue normale au bout de trois jours et le traitement est interrompu.
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