Spécialité de l'article : Remèdes
Parution du 20/08/2021 pour la lettre n° 100
Que peut-on mettre en commun entre l’aspirine et l’homéopathie ? Leur histoire. L’aspirine est utilisée depuis plus de 4000 ans sous forme d’écorce de saule pour ses vertus antalgiques et anti-inflammatoires. L’homéopathie, ou traitement par les semblables, était déjà d’actualité dans les recherches d’Hippocrate. Nous verrons que ces deux thérapeutiques, parmi les plus anciennes encore d’actualité aujourd’hui, ont beaucoup de points communs.
Déjà les Égyptiens utilisaient le saule
L’écorce de saule a, depuis longtemps, acquis ses lettres de noblesse en médecine. Les premières traces sont découvertes sur des papyrus égyptiens, ensuite chez les grecs et Hippocrate. Utilisée tout d’abord pour les douleurs de l’enfantement, elle réapparaît au Moyen-Âge pour traiter les douleurs et l’inflammation. Un chercheur de cette époque lui trouve des vertus pour soigner les fièvres. Il souligne le fait que « si le saule pousse les pieds dans l’eau, il doit être capable de soigner des maladies en lien avec l’humidité et le froid et donc les fièvres… »
La chimie fait son essor au XIXème siècle avec les premiers laboratoires de fabrication de médicaments. C’est un français, Pierre-Joseph Leroux, qui isole le premier le principe actif de l’écorce de saule : la salicyne. Ensuite des scientifiques allemands découvrent l’acide salicylique qui deviendra grâce à Charles-Frédéric Gerhardt l’acide acétylsalicylique, moins corrosif pour l’estomac. C’est un allemand qui travaille chez Bayer, Félix Hoffman, qui dépose un brevet : l’aspirine est née.
Aujourd’hui, ce médicament dont le mécanisme d’action a été découvert récemment (1977) a de multiples indications en dehors de celles qui ont fait sa réputation (douleur, fièvre, inflammation) que l’on ne soupçonnait pas : cardiovasculaire (AVC, infarctus) et durant la grossesse (FIV, hypertension) pour son action anticoagulante, prévention anticancéreuse (côlon) par son action anti-inflammatoire. Nul doute que ce médicament, un des plus anciens connu, issu d’une utilisation totalement empirique, continuera une belle vie au XXIème siècle.
Hippocrate et l’homéopathie
L’homéopathie, sous forme de médecine des semblables, est née avec Hippocrate avec deux concepts fondamentaux : Primum non nocere ou d’abord ne pas nuire et aider en toute circonstance l’action favorable de l’organisme. Il énonce alors trois méthodes qui seront le fondement de notre médecine moderne :
1. La « Natura medicatrix ». En d’autres mots, la nature nous fournit les moyens de nous soigner. Un 75% de nos médicaments sont d’ailleurs issus du règne végétal : l’if comme chimiothérapie, la morphine du pavot ou l’aspirine du saule.
2. L’opposition qui utilise la loi des contraires : on donne au patient un médicament qui combat son mal.
3. L’aide qui fonctionne avec la loi des semblables qui consiste à soigner le malade avec une substance capable de donner au malade des symptômes sembles et de provoquer chez lui une réaction favorable à petites doses.
Hippocrate était un précurseur de la médecine intégrative ! La faculté de médecine n’a retenu que le Primum non nocere qui est malheureusement si peu appliqué.
Samuel Hahnemann « re-découvreur » de l’homéopathie
Si l’on doit à ce médecin, pharmacien et chercheur du début du XIXème siècle la codification de cette thérapeutique, la paternité en revient à Hippocrate. Hahnemann, précurseur de l’étude empirique des traitements, encore utilisée pour la découverte de nos vaccins modernes, et de la clinique au lit du malade, utilisera le 3ème concept de son maître à penser grec. Il constate que l’organisme a une capacité à guérir que l’on peut exploiter en le stimulant. Son contemporain Jenner, inventeur du vaccin de la variole sera de la même école de pensée.
L’homéopathie a traversé l’histoire de la médecine avec ses jours de gloire au XIXème et début du XXème siècle. Elle se dissémine en Europe avec les médecins de Napoléon, soigne avec succès des épidémies de choléra et rend de nombreux services thérapeutiques à une époque où la médecine cherche à développer le second concept d’Hippocrate : trouver des médicaments pour combattre les maux de la population. Devenant médicament dans les années 60, l’homéopathie rejoint l’aspirine comme une des plus anciennes médications au service de la population. La recherche poursuit son travail scientifique pour découvrir le mécanisme d’action d’une homéopathie qui a fait ses preuves sur le plan clinique.
La médecine intégrative reliera ces possibilités thérapeutiques et redonnera à Hippocrate l’entièreté de sa vision de la médecine. L’aspirine et l’homéopathie ont donc une histoire commune faite de constats empiriques, d’une utilisation qui évolue dans le temps et d’une compréhension de ses effets sur le corps très liés aux progrès scientifiques.