Spécialité de l'article : Pédiatrie
Parution du 04/06/2010 pour la lettre n° 56
Travaillant au sein d’une équipe pluridisciplinaire, dans une approche diagnostique et thérapeutique des troubles posturaux, nous avons pu constater l’importance de la bouche dans l’équilibre postural.
Au sein de la bouche, la langue est un organe d’une grande influence sur l’équilibre buccal, mais également sur l’équilibre postural. Elle doit pouvoir s’exprimer, se positionner, se déplacer librement dans la bouche par rapport au palais, ce qu’elle est empêchée de faire actuellement pour deux raisons essentielles :
1/ La tétine constitue une véritable obstruction buccale qui entrave le développement psycho-moteur :
Une dysfonction linguale perturbe l’équilibre non seulement « localement », au niveau buccal, mais également à distance, au niveau postural, du fait de ses points d’attache postérieurs. A l’arrière, la langue est reliée au crâne, et au larynx (entre autres). En tirant ses points d’insertion vers l’avant, elle crée un déséquilibre antéro-postérieur, avec tous les troubles musculo-articulaires et fonctionnels qui en découlent.
Conséquences de ces « tétées tardives » qui empêchent la langue de s’élever au palais :
On observe un déséquilibre postural caractéristique de « vrille en 3 plans » avec :
Ostéopathes, kinésithérapeutes, podologues, voire même chirurgiens vont alors être
sollicités pour réduire ces troubles, qui récidiveront tant que la langue continuera à dysfonctionner.
Si l’on veut traiter la cause il faudra, en réalité, faire appel à l’orthophoniste.
Sachant tout cela, peut-on continuer à rester sans réaction face à l’usage de plus en plus répandu et donc supposé « normal » de ces tétines, ou biberons qui au-delà d’un an n’ont rien de physiologique mais entravent le bon développement physique et psychique de nos enfants ?
D’où l’importance de prévenir plutôt que de guérir !
Entre 6 mois et 1 an, l’enfant est anatomiquement prêt à fonctionner autrement que sur un mode de tétée, mais pour que ces nouvelles potentialités s’expriment, il a besoin d’être stimulé par un changement de mode alimentaire. C’est le moment du passage en douceur à l’alimentation à la cuillère et au verre. Un enfant qui marche ne devrait plus prendre le biberon.
Dès qu’il marche « comme un adulte », il devrait s’alimenter « comme un adulte ».
Il y a des moments favorables à de nouveaux apprentissages dont il faut savoir profiter. Au-delà, les comportements se figent et ce qui n’a pas été mis en place spontanément, stimulé par l’environnement et la nécessité de s’adapter à de nouvelles contraintes, devra faire l’objet d’une rééducation.
Il vaut mieux « perdre un peu de temps » au moment opportun pour en gagner par la suite.
Pour éviter tous ces problèmes, il est important de diffuser l’information et je remercie l’APMH de m’en donner ici l’occasion.
Informer les parents, les pédagogues, les thérapeutes sur :
2/ Autre obstacle majeur à l’adoption d’une position linguale physiologique :
Les pathologies nasales obstructives :
Quand le nez est bouché, la langue doit rester en position basse et antérieure pour que la respiration puisse se faire par la bouche... Il n’y a pas le choix, c’est une question de survie !... En effet, la langue en position physiologique (pointe et bords sur le pourtour du palais) crée une étanchéité buccale, qui empêche toute entrée d’air. Mal positionnée, elle est aussi dysfonctionnelle, les appuis nécessaires pour avaler la salive ou émettre les consonnes antérieures se faisant tout naturellement à l’endroit où la langue prend contact au repos. En cas d’obstruction nasale, la langue, ne pouvant se placer au palais, prendra ses appuis vers le bas (dans la mandibule) et vers l’avant (sur les dents) dans la direction où elle est déjà orientée, en se propulsant.
Traiter les affections ORL, les infections, les allergies, éviter un encombrement nasal chronique sont des conditions indispensables (même si elles ne sont pas toujours suffisantes) et, dans tous les cas, primordiales, pour permettre un positionnement lingual physiologique et une liberté posturale.
Pour cela l’homéopathie nous est d’un précieux recours.
Attention, une fois que les habitudes sont prises, il ne suffit pas de lever l’obstacle pour que la langue retrouve spontanément un positionnement et un mode de fonctionnement physiologique. Une « rééducation » s’avère nécessaire ... Il n’y a pas d’âge pour reprendre les expérimentations sensori-motrices et obtenir une évolution.
...les habitudes prises perdureront sans que la personne en ait la conscience ou l’idée que cela pourrait être autrement.
La position linguale de repos physiologique (pointe et bords orientés vers le haut sur le pourtour du palais, dos relâché en forme de cuillère) ne se réinstallera pas spontanément. La langue continuera :
Ce mode de fonctionnement lingual n’est pas adapté à la posture verticale, il est
source de désordres musculo-articulaires qui ne pourront être résolus qu’à l’aide d’une rééducation orthophonique si l’on veut que les autres traitements soient efficaces dans la durée.
Pour conclure, quelques points à retenir :
Martine JOLY,
Orthophoniste,
Membre fondateur de l’association « Langue, Voix, Posture ».
Consultante aux H.C.L.(pathologie des ATM et posturologie)
service du Dr Thierry Sauvigné (stomato-implantologie),
bibliographie:
• Combeau F : « Dynamique vocale - Dynamique corporelle Prise de conscience par le mouvement »
Edition « Espace du temps présent » : 1995
• Cornut G : « La voix » Que sais-je ? n°627 Edition PUF 2004
• Feldenkrais M : « L’évidence en question » Edition L’inhabituel, Paris 1997
. Joly M, Joly P, Hueber Th: ”Une approche étiologique des troubles de la posture”
Le spécialiste de médecine du sport au service des praticiens, n°39 mai-juin 2002.
Le conseil du Docteur Alain Horvilleur:
Donner trois granules trois fois par jour de l'un des médicaments suivants en fonction des circonstances.