Spécialité de l'article : Humanitaire
Parution du 15/03/2010 pour la lettre n° 55
Pour différentes fausses croyances relayées par les médias, le grand public a du mal à imaginer que l’homéopathie ait une place en médecine humanitaire.
- C’est une thérapeutique qui ne peut pas traiter de « vraies » pathologies.
- Une médecine « placebo », de confort pour les riches !
- C’est trop compliqué pour ces pays pauvres !
- On pense que le SIDA et le PALUDISME ou la malnutrition sont les seules pathologies de ces pays ! Comme si ces populations ne souffraient pas de toutes les autres maladies !!
- Ce n’est pas fait pour l’urgence…
Or l’homéopathie présente de nombreux atouts et de sérieux avantages en médecine humanitaire, c’est-à-dire en médecine pour les populations pauvres :
- C’est une thérapeutique efficace, qui s’appuie sur deux cents ans d’expérience.
- C’est une médecine écologique qui respecte l’homme dans son environnement et sa culture, sans effet secondaire majeur. Or nous connaissons tous les effets désastreux du mauvais usage et du trafic de nos médicaments de synthèse.
- Elle aborde l’homme dans sa globalité et s’adapte aux différentes croyances et systèmes thérapeutiques traditionnels. Elle peut ainsi s’intégrer dans les structures médicales traditionnelles locales.
- C’est une thérapeutique très économique, accessible aux plus pauvres.
En Inde, une étude a démontré que pour un résultat « égal » sur l’état sanitaire de la population, le fonctionnement d’un dispensaire homéopathique coûte environ dix fois moins cher à l’État que celui d’un dispensaire en médecine occidentale et environ cinq fois moins cher que celui d’un dispensaire ayurvédique.
- La fabrication des médicaments homéopathiques, qui utilise très peu de matière première et aucune technologie sophistiquée, est un modèle d’industrie non polluante qui peut se créer dans des pays en voie de développement.
- Le transport et stockage des médicaments sont simples. Par ailleurs les remèdes peuvent êtres fabriqués ou dupliqués de façon artisanale en brousse sur place assez facilement par le soignant lui-même.
- Ainsi l’usage de l’homéopathie va dans le sens de plus d’autonomie, moins de dépendance par rapport à des systèmes sophistiqués.
- Elle constitue souvent une alternative ou une complémentarité des thérapies palliatives. Bien sûr, elle ne peut pas toujours remplacer les thérapeutiques occidentales lorsqu’elles sont nécessaires (antibiotiques, antiparisitaires, chirurgie etc.) mais, dans ces cas, elle peut être utilisée en complément des traitements classiques ou traditionnels.
Plusieurs champs d’action pour l’homéopathie en médecine humanitaire :
- Actions à court terme, Médecine des catastrophes :
Ce n’est pas le champ d’application le plus facile de l’homéopathie par rapport à la force de frappe de la médecine occidentale. Cependant l’homéopathie a toute sa place au côté et en complément des urgentistes.
Déjà au dix-neuvième siècle, au cours d’une épidémie de choléra en Europe, l’homéopathie avait fait la démonstration de son efficacité et utilité, grâce à Hahnemann et à ses collaborateurs
Dans les années 1980, à Lima, au Pérou, des médecins homéopathes ont traité des patients lors d’une épidémie de choléra. Ceux qui avaient reçu un traitement homéopathique n’eurent pas ou peu de besoin de réhydratation ni de traitement antibiotique…
-- En ce qui concerne les maladies infectieuses épidémiques, Hahnemann nous a appris à trouver le remède du génie épidémique. Nous pouvons encore aujourd’hui le prescrire rapidement et largement à une population exposée sans rechercher le remède individuel propre à chaque patient.
-- L’homéopathie est aussi fort utile pour traiter les syndromes post-traumatiques, comme dans les expériences à Tsula (120 000 habitants plus 100 000 réfugiés) en Bosnie par l’équipe d’HSF Hollande, à Mostar par HSF Allemagne et Sarajevo par HWB GB. Mission HSF France au Sri-Lanka après le tsunami
-- Action sur le long terme : Médecine générale – Médecine tropicale
Il ne s’agit plus ici d’intervenir ponctuellement, mais de faire en sorte que les populations les plus démunies des pays pauvres puissent avoir accès aux soins par l’homéopathie et prendre elles-mêmes en charge les pathologies courantes et tropicales.
Il s’agit donc de former à l’homéopathie les médecins locaux et les agents de santé (pharmaciens, sage-femme, infirmiers) .
C’est ce que proposent dans de nombreux pays des associations comme Homéopathes Sans Frontières (HSF) ou Solidarité Homéopathie. En Europe on peut citer les HSF Allemagne – Hollande – Suisse – Roumanie – Espagne – France – Grande Bretagne – qui agissent dans les pays suivants : Madagascar, Bénin, Togo, Cameroun, Sénégal, Burkina, Ghana, Bosnie, Guatemala, Honduras, Pérou, Salvador, Nicaragua, Bulgarie, Hongrie, Croatie, Égypte, Éthiopie.
Formation de formateurs pour que, dans chaque pays, puissent exister des sortes d’écoles d’homéopathie et que se développe ainsi l’usage de l’homéopathie. Globalement les programmes et le cursus de formation sont calqués sur ce que nous connaissons en Europe.
L’homéopathie sera utilisée pour de nombreuses pathologies : en infectieux (diarrhée, fièvres, paludisme, certaines viroses ou parasitoses), en rhumatologie, gynéco-obstétrique, psychiatrie (angoisses, dépression, peur), etc., soit en traitement seul, soit en association avec les traitements allopathiques, ce qui permet d’employer des doses plus faibles et surtout d’atténuer les effets secondaires (exemple de CHINA et traitement à la quinine).
En pratique nous procéderons de façon très classique en appliquant la loi de similitude et en cherchant le remède le plus proche du tableau du patient. Cette recherche peut s’aider des notions de terrain.
Spécificité tropicale : Les remèdes homéopathiques ont été expérimentés (proving) sur des individus européens, il y a-t-il une sensibilité différente selon les races?
Notre expérience ne semble pas noter de différence sauf, bien souvent, une beaucoup plus grande réactivité aux remèdes pour certains patients. Comme si les méfaits de notre mode de vie occidentale nous avaient rendus beaucoup moins sensibles que les populations aux modes de vie plus proches de la nature… « En effet, il n’est pas rare de guérir une laryngite aiguë avec deux ou trois granules d’Hepar sulf ou d’Argentum met, ou une coqueluche avérée avec trois granules de Drosera en une prise ! Ou un neuropaludisme avec quelques prises de Gelsemium ou l’anurie résistante au traitement classique d’une jeune fille atteinte du choléra guérie avec trois granules de Phosphorus » (C. Gaucher dans : Homéopathie, médecine tropicale et humanitaire - CY éditions).
L’utilisation des isothérapiques semble très prometteuse pour le traitement des parasitoses tropicales, en particulier pour le paludisme.
HOMÉOPATHIE ET MÉDECINE TROPICALE
DIARRHÉES Les diarrhées aiguës sont les maladies les plus meurtrières pour les enfants aujourd’hui, selon un rapport de l’UNICEF, et source de morbidité majeure avec l’aggravation des malnutritions.
Le choléra est certainement le type de diarrhée aiguë le plus grave, nous le prenons en exemple. Déjà Hahnemann et ses disciples avaient soigné des épidémies à Leipzig, Toulon, Marseille, Venise au XIX° siècle. Ils avaient isolé trois remèdes principaux Camphora, Veratrum album et Cuprum met, et trois remèdes moins importants : Arsenicum album, China, et Phosphoricum acidum. Ces mêmes remèdes ont montré toute leur utilité lors de l’épidémie du Pérou.
MALNUTRITIONS : Les traitements homéopathiques reposent ici essentiellement sur les traitements de terrain qui favorisent, accélèrent la guérison en cas de correction de la nutrition.
Le marasme nutritionnel évoque Silicea et Natrum mur, mais aussi Arsenicum, Phosphorus, China… Le kwashiorkor (carence protidique et sevrage trop précoce) est à rapprocher de la « sycose ».
PARASITOSES : Le paludisme surtout mais aussi les trypasonomiases, les leishmanioses, l’amibiase, la filariose, etc. peuvent avantageusement bénéficier de l’homéopathie.
Le traitement homéopathique est très efficace mais extrêmement difficile et complexe car chaque malade fait sa maladie à sa manière avec des modalités bien différentes. Nous ne sommes plus dans un contexte épidémique.
Pour aider la prescription nous proposons un « arbre décisionnel », par exemple, pour le paludisme, le fil conducteur peut être le frisson : violent ou léger, avec ou sans soif, avec peu ou beaucoup de fièvre etc., selon les signes d’accompagnement, les horaires etc.
Article en relation avec le sujet :